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Première Enumération

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Message  L' Apostat Sam 11 Juil 2015, 05:17




Il ne lui fallu qu’un pas, un seul pas, pour se défaire de son corps.

Un instant, il n’était qu’un homme simple, au visage commun, la chevelure nouée sur sa nuque pour ne pas le gêner. La robe qui couvrait son corps élancé se balançait sous le souffle d’une brise irréelle, impossible dans cette pièce close. Sa chaussure de cuir souple s’éleva du sol, et se reposa en avant, entre deux lignes tracées dans la poussière.



Ce fut à ce moment précis, en cet instant bien particulier, que tout bascula. Le chaud devint froid, l’humidité se fit sèche, la lumière pénombre, et le silence plus tumultueux qu’une tempête.



Les incommensurables énergies telluriques rassemblée en ce lieu, sur ce point précis dessiné au sol, furent brutalement aspirées par l’appel de l’Architecte. Seules les incantations rigides et tenaces de l’homme se dressèrent comme une barrière invisible pour le protéger du flot arcanique.



Un naufragé aux bras ouverts, défiant la mort qui hurlait, tempêtait face à lui. La bulle de protection érigée par les énumérations augmentiques frémissait à chaque vague électrifiée qui se brisait contre ses parois. Les symboles par ses soins dans la poussière, loin de s’effacer sous les bourrasques de magie incontrôlées, fumaient et crépitaient, leur empreinte se mettant à s’illuminer d’une lueur bleuté.



Tandis que les forces telluriques ne cessaient de monter en puissance, la voix de l’Architecte s’élevait en échos, canalisant méthodiquement chaque flambée bleuté qui jaillissait dans sa direction.



Ses trois apprentis n’eurent ni sa chance, ni son talent nécessaire à leur propre survie.



Placés aux trois points du triangle primaris tracé au cœur du grand cercle, chacun d’eux jouait à la fois le rôle de pilier et de vecteur. Les forces libérés par leur invocation fusait de l’un à l’autre, se chargeant sous les récitations numéraires et les engrenages algébriques. Mais quand le premier fouet d’énergie pure leur échappa, il en découla une cascade d’erreurs, d’anomalies, qui transformèrent leur synchronisme parfait en une équation bancale, incorrecte.

Une simple variation, aussi brève qu’infra décimale au milieu de la myriade de syllabes égalitaires.



La première apprentie, du nom de Iseys, fut la plus chanceuse du trio. Elle n’eut pas le temps de souffrir, lorsqu’une seule faute d’accord de sa part la vaporisa, purement et simplement. Son souffle résonnait encore au milieu du brouhaha, que sa peau, sa chair et ses os disparurent dans un éclair blanc, privant soudain l’assemblage de l’architecte de son équilibre, aussi précaire pouvait-il être dans cette dangereuse entreprise.



Le second acolyte, un homme des carmines à la peau teintée des reflets du bronze, senti son âme se disloquer, et ses incantations énuméraires s’éteignirent dans un râle d’agonie. Son pied gauche bougea légèrement, lui faisant quitter sa position initiale, et son erreur le fit s’enflammer. Des flammes d’un bleu éclatant, bondissant sur lui comme autant d’insectes affamés, eurent tôt fait de le transformer en torche vivante. Avec l’énergie du désespoir, il se débattit, agitant les bras pour tenter d’éteindre ce brasier arcanique. Son agonie ne dura que quelques secondes avant que son corps calciné ne s’effondre sur lui-même dans la poussière. Son cri en revanche, continua de se répercuter, nourrissant les énergies incontrôlables qui fissuraient les murs de la pièce.



Le dernier élève de l’Architecte chercha tout simplement à s’enfuir. Il bondit vers la porte, abandonnant son maitre, sa charge, et son devoir.  Les éclairs fourchus qui craquaient au dehors de la tempête arcanique s’abattirent autour de lui, bien que par un coup du destin, aucun ne l’atteignit. Sa chance dura encore dix sept secondes, jusqu’au moment ou ses mains se posèrent sur la poignée de la porte. A cet instant, toute la puissance qui s’était accumulée dans les murs épais gravés de rune, fautes de pouvoir s’échapper, trouvèrent là un parfait conduit.



Le pauvre homme ne fut pas vraiment détruit au sens propre. Il implosa. Toute sa masse corporel se retrouva soudain à n’occuper qu’un espace sphérique, pas plus gros qu’un œil, ses chairs se condensèrent sur elle-même dans un bruit de papier déchiré. Il n’en résultat qu’une masse fumante sur le sol, un gruaux particulièrement hideux à observer.



Ne resta alors que l’Architecte, seul, au milieu du chaos. Pendant quelques secondes, il sembla résister seul face au flot monstrueux des énergies telluriques, mais ses défenses s’effondrèrent l’une après l’autre.



Dans un ultime cri de rage et de dépit, il modula sa voix, variant l’équilibre parfait de ses propres énumérations. L’effet fut sans appel, comme un souffle sur la flamme d’une bougie, et en un instant, tout s’arrêta.



Lorsque ses genoux heurtèrent le sol, la douleur fut pour lui l’unique preuve de sa survie. Tremblant, en sueur, son corps desséché au point d’être méconnaissable, il pouvait sentir dans sa bouche le goût ferreux du sang.



Il n’eut pas besoin de regarder vers les restes, ou les non-restes, de ses apprentis, pour obtenir une vision claire de la situation. Les éléments s’agencèrent peu à peu dans son esprit, et même cette grossière équation digne d’un enfant de six ans lui arracha des spasmes nauséeux.



Il avait échoué. Une fois de plus.



La faute à ses maudits étudiants, ses porcelets dénués du moindre talent. Ces misérables avaient transformés l’apogée de toute une vie en un échec cuisant. Leur manque de précision et de rigueur, leurs émotions en roue libre.



Si l’Architecte avait été esclave de ses propres sentiments, la colère l’aurait emporté. Ou le désespoir. Voir même un savant mélange des deux, qui l’aurait poussé à détruire, ou se détruire lui-même.



Bien heureusement, il n’était pas ce genre d’homme.





Se relevant, dans sa longue robe sanguine, il entreprit tout d’abord de ramasser son bâton, et le peu de ses effets qui avaient survécu par miracle à la catastrophe. Puis, après s’être assuré d’avoir convenablement effacé chaque rune et chaque empreinte au sol, il quitta la cave de la colline aux corbeaux.



Cet échec n’était qu’une variable de plus, une nouvelle donnée à ajouter à l’ensemble de ses travaux. Ni plus, ni moins. Bientôt, il maitriserait suffisamment les instables courants du néant, et les énumérations radicales pour les dompter. Dès lors, la voie de la connaissance lui serait grande ouverte.



Mais pour l’instant, une tâche bien plus terre-à-terre l’attendait, et cela le laissa perplexe.

Il devait sans attendre se trouver de nouveaux apprentis. Et pas n’importe lesquels.



Il lui fallait le ou la meilleure.





L' Apostat
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