L'Epouvantail

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Message  The Sbire / Scarvey Jeu 30 Oct 2008, 14:00

Marches de l’Ouest – Quelques années auparavant.

Je suis heureux. Ce matin, j’ai rendez-vous avec Alice. Je n’en ai presque pas dormi tellement mon cœur palpitait d’excitation à l’idée de faire le chemin de l’école avec elle. Je me suis levé d’un bond au premier rayon de soleil et je suis descendu, happé par le parfum du petit déjeuner que ma jolie maman préparait. Comme chaque matin, j’ai le droit à mon câlin et une multitude de compliments. Je n’ai jamais connu mon père, il est en mort en héros, à la guerre. Et tout le village m’adore et même que j’hériterai de lui sa bravoure et sa force. J’ai préparé mon cartable aujourd’hui, comme un grand, avec une pomme pour le Maître. La cloche de l’école sonne les huit coups. C’est l’heure. Je termine mon bol de lait et j’enfile ma veste. Elle est là. Alice. Devant ma porte. Ma mère m’embrasse une dernière fois avant de me laisser filer avec mon gros cartable carré sur le dos. J’essaie de rejoindre Alice, mais plus je m’approche d’elle, plus elle me parait s’éloigner. Ma vue se brouille. Les sons disparaissent. Et le visage de la belle Alice commence à se déformer. Ses belles joues rondes se rétrécissent, son teint rosé devient jaune et son sourire s’efface. Elle se met à grandir soudainement, m’écrasant presque. Ma mère rit derrière moi, sa voix douce devenue rauque. Lorsqu’enfin je pus m’approcher d’elle, la jeune fille que j’aimais avait pris l’apparence d’un immense balai de paille dont l’ombre me recouvrait totalement et qui me tomba dessus…

« Debout, grosse larve ! Hurlait ma mère en me frappant avec son balai. Lève-toi Scarvey ou je t’en colle une ! »

(à suivre)

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Message  The Sbire / Scarvey Sam 08 Nov 2008, 14:56

Je déteste la soupe de potiron. Je déteste les potirons. Je déteste ma mère qui ne sait cuisiner que ça depuis que papa est parti ! Il ne reviendra jamais. Tous ses effets servent à présent de chiffons, de bâches ou même d’habits pour l’épouvantail, planté au milieu de notre champ. Inutile. Inefficace. Les oiseaux s’y perchent, narquois et chaque matin chantent : « Ton papa prouve son inutilité, même après sa mort ! Piou piou ! Regarde comment tout le monde s’en fiche de ton papa ! Piou piou ! ». Je hais les oiseaux. Parfois, j’en ai peur. Il m’arrive souvent d’imaginer qu’un jour ils se rassemblent tous et attaquent le village. Avec la chance que j’ai, ils n’attaqueraient que moi. Ma mère me colle une grosse claque derrière la nuque, ma tête se plante dans la soupe de potion, éclaboussant la table et me valant droit à une seconde claque pour l’avoir sali. C’est habituel. Avant, je pouvais accuser l’alcool. Maintenant je sais qu’elle est comme ça, même sobre. L’alcool ne lui fait plus rien, elle ne boit même plus d’eau. Elle ne se sert même plus d’eau, crade comme une clocharde. Elle continue à se trainer dans la maison, comme un fantôme, à survivre, juste pour le plaisir de me pourrir la vie. Papa me manque.

(...)

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Message  The Sbire / Scarvey Jeu 18 Déc 2008, 04:02

Chaque journée se suit et se ressemble. A quoi bon continuer ainsi ? Lorsque je mets les pieds à l'école, les autres enfants se moquent de moi, de ma petite taille, de ma grosse tête et de mon œil rond. Le monde des apparences ne me convient pas. Si seulement ils se contentaient de me laisser en paix, de m'ignorer... Papa, comment tu faisais, toi, quand t'étais petit ? Le seul endroit agréable, c'est mon lit. Là au moins je peux m'évader et oublier les insultes. Parfois j'aimerais mourir car ma vie n'a plus aucun sens ; personne à qui je vais manquer, personne pour retenir mon geste, personne. Mais parfois. J'aimerais que ce soit eux... qui meurent. Philippe, Gontran et Lucie. Maman. La Maîtresse. Le Maire. Que Ruisselune plonge dans l'anarchie. Que cette anarchie me mène à la notoriété. Que cette notoriété me soit enfin profitable et offre un sens à ma vie. Mais cette pensée demeure le seul moment de bonheur que je peux m'offrir avant de m'endormir, sachant que ni mes rêves, ni le réveil brutal par ma mère, crachant toute sa vulgarité au milieu de son vomi, ne sauraient m'assurer d'un avenir meilleur.


(...)

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